Depuis le 1er septembre 2024, une mobilisation contre la vie chère en Martinique a débuté. Cette mobilisation a été initiée par le RPPRAC qui, le 1er juillet dernier a fait une injonction à la grande distribution, demandant l’alignement des prix sur les produits alimentaires à ceux de la France hexagonale. Depuis, une première table ronde s’est tenue en préfecture, la semaine dernière et a débouché sur des propositions faites par les acteurs de la grande distribution. Une seconde table ronde aura lieu, ce jeudi matin.
Du côté de la CTM, elle a décidé de prendre des mesures afin de lutter contre cette vie chère. Les taux d’octroi de mer et d’octroi de mer régional sur 54 familles de produits vont être supprimés. Ces 54 familles de produits correspondent dans les magasins à plusieurs centaines d’articles de première nécessité et de grande consommation (pâtes alimentaires, pommes de terre, ail, dentifrice, condiments, conserves alimentaires, serviettes hygiéniques et couches pour bébé).
Ce dispositif sera proposé par Serge Letchimy, président du conseil exécutif de la CTM à l’Assemblée de Martinique pour délibération, dans le cadre de la plénière prévue, les 3 et 4 octobre 2024. Une fois adoptée, cette mesure sera appliquée, dans un premier temps, à titre expérimental sur une période de 36 mois et représente un effort fiscal de plus de 5,9 millions d’euros par an pour les collectivités (communes et CTM).
La lutte contre la vie chère ne pouvant être menée par la seule action de la Collectivité Territoriale de Martinique, cette exonération d’octroi de mer est conditionnée à l’engagement de l’ensemble des acteurs concernés – État, grossistes, distributeurs, transporteurs – à mettre en œuvre, dans un délai d’un mois avant le 3 octobre 2024, des mesures et actions concrètes et perceptibles par la population :
Pour l’Etat :
· La suppression de la TVA sur les produits de première nécessité et de consommation courante ;
· L’application des articles 410-2, 410-3 et 410-4 du Code du Commerce afin de :
o Bloquer les prix à la consommation par décret en Conseil d’Etat
o Réduire et encadrer les marges des importateurs, grossistes et distributeurs
· L’augmentation du POSEI consacré à la diversification alimentaire locale et la mise en place d’outils destinés à aider le développement et la structuration des filières de diversification pour réduire notre dépendance aux importations
· L’augmentation de l’aide au fret, dans une logique de continuité territoriale, destinée à compenser le surcoût du transport sur l’importation de matières premières et des biens d’équipement rentrant dans le processus de fabrication des productions locales
Pour les transporteurs :
· L’application d’un tarif ad valorem sur les conteneurs de produits alimentaires, d’hygiène et de consommation courante pour en diminuer les coûts d’acheminement. Il s’agit de prendre en compte la valeur des produits transportés plutôt que le volume.
Pour les importateurs, grossistes et distributeurs :
· La réduction des marges commerciales
· La répercussion sur les prix à la consommation, des aides européennes, nationales et territoriales accordées aux producteurs locaux
L’ensemble de ces mesures, conjuguées aux efforts des collectivités et au nécessaire contrôle du marché par l’Etat, devraient permettre de sortir du cycle de la vie chère subi par les Martiniquais.
Une mission dédiée à la surveillance des prix et des produits mise en place
Les conditions posées par le Conseil Exécutif de Martinique sont nécessaires afin de garantir la répercussion de ces mesures sur les prix à la consommation. En effet, en 2009, les collectivités locales avaient déjà consenti à une diminution des taux d’octroi de mer sur 218 produits. Ces baisses n’ont jamais été répercutées sur les prix à la consommation, faute de contrôle suffisant de l’Etat. Aujourd’hui, l’écart de prix sur les produits alimentaires entre l’Hexagone et la Martinique est de plus de 40% en moyenne.
D’autre part, pour s’assurer que ces actions bénéficient directement à la population martiniquaise, la Collectivité Territoriale de Martinique mettra en place une mission dédiée à la surveillance des prix des produits concernés et des marges.
Dans le cadre des mesures annoncées, la Collectivité Territoriale accorde une importance particulière à la préservation des ressources fiscales des communes de Martinique et engage de manière concomitante des travaux sur la mise en œuvre de mesures de péréquation visant à garantir le manque à gagner de recettes fiscales généré par cette modification des taux d’octroi de mer.
Si l’application de l’exonération de l’octroi de mer sur les produits de première nécessité peut constituer un des leviers dans la lutte contre la vie chère, elle est également une arme à double tranchant qui n’est pas sans conséquences pour les finances publiques locales. Cette taxe est la seule recette fiscale autonome des collectivités de Martinique, notamment utilisée pour compenser la réduction des dotations de l’État et le non reversement de certaines compensations financières relatives aux aides sociales (RSA, AAH, APA, etc.).